Le spécialiste du financement de la chaîne d’approvisionnement Greensill Capital a introduit une demande d’insolvabilité en mars 2021. Les investisseurs dans les fonds assurés liés à Greensill qui ont été structurés et promus par Crédit Suisse, dont beaucoup pensaient qu’ils investissaient dans des alternatives sûres aux fonds liquides et de marché monétaire, pourraient perdre la totalité ou une partie substantielle de leurs investissements.
Qui est Greensill ?
Greensill est une société britannique de services financiers fondée par le banquier et homme d’affaires australien Lex Greensill. Greensill se présentait comme une start-up technologique qui faisait concurrence aux banques traditionnelles en offrant un financement flexible de la chaîne d’approvisionnement (« supply chain funding »). Au lieu de conserver les obligations de paiement de ses clients dans son bilan comme une banque traditionnelle, Greensill Capital les titrisait en instruments de type obligataire et les vendait à des sociétés de services financiers.
Ce qui a mal tourné et comment les investisseurs dans les fonds assurés du Crédit Suisse pour le financement de la chaîne d'approvisionnement ont été impactés
Le financement de la chaîne d'approvisionnement est généralement considéré comme un investissement sûr parce qu’il repose simplement sur l’attente du paiement par une entreprise de marchandises déjà reçues et, surtout, parce que le risque de crédit sous-jacent est généralement couvert par une assurance. Cependant, alors que Greensill pratiquait initialement un financement de la chaîne d'approvisionnement relativement simple, au fur et à mesure de sa croissance, il a financé de plus en plus, non seulement les obligations existantes des clients, mais aussi les futures factures pour lesquelles il prévoyait juste que les clients chercheraient un financement, appelées par Greensill « créances futures ».
L’été dernier, le principal assureur de Greensill (Tokio Marine) a averti Greensill qu’il pourrait, à sa seule discrétion, ne pas renouveler sa couverture d’assurance. En septembre 2020, Tokio Marine a notifié à Greensill que sa couverture ne serait définitivement pas renouvelée 6 mois plus tard, au 1er mars 2021. Greensill n’est pas parvenu à trouver un remplaçant à Tokio Marine et a fini par introduire une action en justice de dernière minute pour forcer Tokio Marine à maintenir sa couverture, quelques jours avant que la police d’assurance ne prenne fin. Mais un tribunal en Australie a rejeté l’affaire, invoquant les avertissements préalables de Tokio Marine. A l’arrivée du 1er mars et du non-renouvellement des polices d’assurance, Crédit Suisse a décidé que les fonds devaient être bloqués, empêchant ainsi ses clients de retirer leurs investissements.
Crédit Suisse a-t-il été négligent ?
Le Crédit Suisse a mis en place les fonds de placement assurés liés à Greensill et en a fait la promotion auprès d’investisseurs cherchant du rendement, en tant qu’instruments sûrs et en tant qu’alternative aux fonds du marché monétaire en raison de leur caractère assuré. Le Crédit Suisse était en outre le gestionnaire de portefeuille du fonds.
Il est incontestable que les investisseurs n’ont, durant l’été 2020, pas été informés du fait que la principale compagnie d’assurance s’était retirée et que, par conséquent, les fonds ne seraient plus entièrement assurés à partir du 1er mars.
On ne sait toujours pas avec certitude quand Crédit Suisse a appris que l’assurance de Greensill ne serait pas renouvelée. Crédit Suisse a affirmé n’avoir appris le refus de Tokio Marine de renouveler ses polices d’assurance qu’en février 2021. Mais il existe des rapports qui indiquent qu’à tout le moins depuis l’été 2020, Crédit Suisse envisageait d’instaurer une règle obligeant Greensill à diversifier ses fournisseurs d’assurance, ce qui indique que le Crédit Suisse avait une visibilité sur le statut de la couverture d’assurance de Greensill. Il se peut également qu’il y ait une différence entre ce que Crédit Suisse savait réellement et ce qu’il aurait dû savoir en tant que promoteur et gestionnaire de portefeuille des fonds assurés liés à Greensill.
Voies de recours possibles pour les investisseurs ?
On ne sait toujours pas dans quelle mesure les investisseurs pourront récupérer leurs investissements et si et comment les polices d’assurance couvriront les investissements effectués par le fonds avant le 1er mars 2021.
Au stade actuel de notre enquête, notre principale question est la suivante : pourquoi Crédit Suisse a-t-il continué à commercialiser ce fonds comme un produit entièrement assuré et un investissement à faible risque et diversifié, à la lumière de la décision prise par les compagnies d’assurances durant l’été 2020 de ne pas renouveler les polices d’assurance ? Nous estimons qu’après le retrait de la compagnie d’assurance principale, le profil de risque du fonds a drastiquement changé du jour au lendemain par rapport à la façon dont il avait jusqu’alors été promu par Crédit Suisse. Les investisseurs n’en ont cependant pas été informés en temps voulu et pourraient donc potentiellement intenter une action à l’encontre de Crédit Suisse.
En outre, les facteurs de risque mentionnés dans les prospectus du Crédit Suisse n’indiquent pas que les compagnies d’assurances avaient la possibilité, à leur propre discrétion, de ne pas renouveler leurs polices. Si la couverture d’assurance était limitée dans le temps avec une possibilité de reconduction à la discrétion de l’assureur, cela aurait dû être clairement indiqué dans le prospectus comme étant un facteur de risque distinct afin que les investisseurs sachent que la protection était relative et que le produit n’était pas « entièrement assuré », comme le promouvait Crédit Suisse.
Crédit Suisse a déclaré qu’il n’avait été informé de l’annulation des polices d’assurance qu’en février 2021. Cela semble être potentiellement soit faux, soit indiquer une forme de négligence grave, étant donné que Crédit Suisse a mis en place et géré les fonds et connaissait l’état des finances de Greensill, ayant prêté à Greensill la somme de 140 millions de dollars en prévision d’une introduction en bourse conseillée par le Crédit Suisse.
Par ailleurs, la concentration des risques dans certaines contreparties et diverses transactions entre apparentés entre Greensill, le Vision Fund de Softbank, les entreprises du magnat de l’acier Sanjeev Gupta et Crédit Suisse nécessitent des éclaircissements supplémentaires, car il semble que les créances sous-jacentes étaient moins diversifiées que ce que le Crédit Suisse avait initialement présenté.
Nous examinons actuellement les options juridiques dont disposent les investisseurs pour récupérer les pertes subies.
Si vous souhaitez être tenu informé de nos initiatives, veuillez contacter Edouard Fremault (edouard.fremault@deminor.com).
Les personnes ayant investi dans les fonds du Crédit Suisse liés à Greensill sont invitées à laisser leurs coordonnées et l’un de nos experts prendra contact avec elles. Le fait de laisser vos coordonnées nous permettra également de vous tenir informés de l’état d'avancement de nos enquêtes et des actions que nous proposerons aux investisseurs concernés. Vos coordonnées resteront confidentielles et conformément aux règles du RGPD, et elles ne seront pas utilisées à d’autres fins que celles de vous tenir informé de nos enquêtes et des actions que nous proposons.
Nom de la société
Credit Suisse – Greensill
Royaume-Uni